Jamais aussi bien servi que par soi-même!

14 Nov

Depuis 2011, notre fier pays s’est doté d’une belle plateforme ouèbe d’open data, pour que nous autres citoyens puissions aller consulter un tas de documents gouvernementaux ou concernant des entreprises publiques. Innovation, transparence, ouverture : tout ça au programme !

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Prends ça dans ta tronche, citoyen bêta !

Avant ce matin, je dois dire que je n’avais jamais navigué sur ce site, non pas que je n’en eusse pas entendu parler mais simplement parce que j’avais la flemme. Certes, j’en éprouve une légère honte. Moi, toujours prête à fustiger les dysfonctionnements étatiques, et dont le métier est d’analyser des tonnes d’informations, j’aurais dû me pâmer devant cette banque de données comme les pionniers du Yukon découvrant l’or du fleuve Klondike.

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Image d’Epinal : moi, à l’assaut de data.gouv.fr.
Ou comment réutliser brillamment ma littérature préférée

Il n’en a rien été, shame on me.

Mais bon, deux événements concommitants m’ont poussée à aller y voir de plus près.

Déjà, P. qui me raconte hier soir que sa glorieuse entreprise est en passe de se pencher sur une stratégie de réflexion sur la façon dont elle allait pouvoir alimenter une plate-forme d’open data, parce qu’il parait que ça intéresse plein de monde.

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Re-prends ça dans ta tronche, usager bêta !
(Z’avez vu, ils ont oublié d’enlever le « test » dans l’URL)

Et Charles qui a fait mention dans son édito du 13 novembre d’un lien prometteur vers ce document tout frais.

Document qui liste toutes les subventions accordées par l’Etat aux associations, en 2012, avec le montant et tout, en provenance directe de Bercy (de la Direction du Budget même, c’est dire si c’est sérieux).  Alors je me rue, je télécharge, j’ouvre le fichier Excel, je découvre un bordel sans nom, je trie un peu… et là, immédiatement, j’intuite qu’il y a matière à me régaler d’une bonne tranche de rire : l’écume me monte aux lèvres, mes papilles se dilatent, ma fréquence cardiaque s’accélère, etc.

Je ne dévoilerai pas toutes mes trouvailles ici, pour vous laisser éventuellement un peu de plaisir à découvrir plein de trucs étonnants (quoique…) et incroyables (quoique… bis).

Donc, au total, 1,9 milliards d’euros ont été distribués à 65 451 associations.

Bon, à vue de nez, on se dit :

« Bah ça va, ça fait 29 000€ par assoc’, à peine de quoi acheter de nouvelles cages de foot aux jeunes du coin! Faut bien qu’ils s’amusent! »

Sauf que non, comme d’hab, Pareto s’en mêle,  et là en l’occurrence il est même largement surclassé et blackboulé violemment, puisqu’il se trouve que 80% du pognon est palpé par… 1886 associations, soit même pas 3% d’entre elles !

On est loin des 80/20.

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« Ben merde alors »

Pour votre culture personnelle, sachez que plus de 50% du blé est gracieusement donné par le ministère de la Culture et de la Communication (496 M€, 27% du total) et le ministère du Travail, de l’Emploi et de la Santé (467 M€, soit 25 autres % du total).

Alors, grande gagnante, l’AFPA (Association Nationale pour la Formation aux Adultes), dirigée depuis 1 an par Hervé Estampes (ENA) qui arrive en tête avec plus de 65M € perçus. Bon, c’est cool, l’AFPA, bras armé de la formation professionnelle, tout ça, c’est important. Soit. Mais quand même je me demande ce que cette boîte fabrique dans ce fichier, c’est pas sérieux si ?

Le 2ème poste le plus important est occupé par… l’Association Philharmonie, qui gère la maîtrise d’ouvrage de l’édification de la Philharmonie de Paris. Chantier controversé dès l’origine, dont l’impact financier a été complètement sous-estimé, et qui est déjà pointé du doigt par de nombreux rapports (ici , ou encore ici par exemple). Ainsi, pour tenter l’impossible et sauver ce Titanic à la dérive déjà à moitié coulé, le Ministère de la Culture, au titre du programme 131 – Création, a libéré 56 M€.

Et devinez ce qui est subventionné, à hauteur de 63 M€, par le ministère du Budget (lui-même, ce qui est un gage absolu d’abnégation et de totale éthique) au titre du programme 218 – Conduite et pilotage des politiques économiques (‘ttention c’est sérieux) ? Hein ? Ben l’EPAF, l’ALPAF, l’AGRAF et l’ATSCAF tiens (au passage, ces sigles me font penser à ça) ! Vous savez, tous ces machins qui permettent aux pauvres fonctionnaires des finances publiques et à leurs enfants de partir en vacances, de se loger, de se restaurer et de se divertir.

Ben quoi, où est le problème ? On n’est jamais mieux servi que par soi-même, non ?! Pis bon, c’est important les vacances gratuites pour bien piloter les politiques économiques comme il faut, merde !

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Fonctionnaire des finances dans le besoin, profitant de ses vacances sociales au titre du programme 218 – Conduite et pilotage des politiques économiques.

Je mentionne là le plus beau détournement de l’intitulé des programmes, le plus gros. Mais sachez que l’on retrouve (entre autres) 9 M€ pour la Fondation d’Aguesseau sous 310 – Conduite et pilotage de la politique de la justice, et même 405 000€ pour l’Association des Usagers du Restaurant des Ministères Sociaux sous le programme 124 – Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative. Normal !

Avec tout ça il ne reste plus tellement de sous, une fois que ceux qui tiennent les cordons de la bourse se sont généreusement servis. C’est ainsi qu’à peine 3 M€ sont distribués au titre du programme 157 – Handicap et dépendance, soit moins que pour l’Association d’Action Sociale, culturelle et sportive du Ministère de l’Agriculture et de la pêche (programme 215 – Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture).

Nous sommes entre de bonnes mains !

Vive la France, et vive l’Open Data. Et le socialisme.

4 Réponses to “Jamais aussi bien servi que par soi-même!”

  1. ingenieurchamane 15 novembre 2013 à 14:22 #

    Beau travail de prospection, c’est édifiant. Et vive Don Rosa!

  2. Deres 25 novembre 2013 à 10:02 #

    L’utilisation d’associations et de subventions permet de faire passer des versements aux fonctionnaires donc des dépenses de fonctionnement vers les dépenses d’intervention (souvent abusivement appelés investissement par l’Etat au passage). En fait, ce sont des moyens de détourner la RGPP. En effet, par ce moyen comptable, les ministères on,t réussi à afficher des baisses de dépense de fonctionnement qui en fait n’existait pas. Sachant que par derrière, ils ne récupérait en plus 50% sous forme de prime. Et après on se demande pourquoi certains ministères ont redistribués plus d’argent que leurs économies pour la RGPP …

  3. antigauchisme 1 décembre 2014 à 22:07 #

    merci beaucoup de l’info quand la France sera devenue a peu près aussi vivable que le mexique ou l’irak, ce sera le sang du personnel des epaf alpaf agraf alscaf qui va couler, foi d’antigau Pour que ces connards n’en ai jamais fini de morfler (bah oui toute vie est courte, la mienne n’échappera pas a la règle), je vais lancer des rumeurs sur le net comme quoi le sang des employés des epaf, alpaf, agraf, alscaf guérit le cancer, prolonge la jeunesse et booste la libido Le sang des vampires n’a que des effets bénéfiques et spectaculaires sur les simples mortels, c’est bien connu

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